Jean DOUSSINE1874 - 1911
- Status : Prêtre
- Identifier : 2289
Identity
Birth
Death
Other informations
Missions
- Country :
- China
- Mission area :
- 1897 - 1911 (Yibin [Suifu])
Biography
[2289]. DOUSSINE, Jean-Edouard, vint au monde le 7 février 1874 à Saint-Vincent (Basses-Pyrénées), et fit ses études au petit séminaire de Saint-Pé et au grand séminaire de Bayonne. Pendant son service militaire, son capitaine, qui l'avait choisi pour donner des leçons à ses enfants, lui offrit de l'exempter des manœuvres : Oh ! non, répondit-il, le Christ a porté la croix, je puis bien porter le sac. " Le 10 septembre 1895, il entra minoré au Séminaire des M.-E.
Prêtre le 27 juin 1897, il partit le 28 juillet suivant pour le Se-tchoan méridional. Après avoir travaillé dans les districts du Kien-tchang : à Mien-lin en 1898, à Houang-mou-tchang en 1899, à Te-tchang en 1901, il passa en 1903 à Kia-kiang, et en 1910 à Lou-chan, dans la préfecture de Ya-tcheou, où il entreprit l'érection d'une chapelle et d'une école. Atteint de la fièvre en mars 1911, il commit une imprudence qui aggrava son état, et le 7 avril suivant, il mourut à Lou-chan.
Il s'était fait remarquer par sa charité. Tous les jours, il soignait les malades dans son presbytère, lavait les plaies les plus hideuses et y appliquait des remèdes.
Obituary
M. DOUSSINE
MISSIONNAIRE APOSTOLIQUE DU SU-TCHUEN MÉRIDIONAL
Né le 6 février 1874
Parti le 28 juillet 1897
Mort le 7 avril 1911
Le 7 avril 1911, notre cher confrère, M. Doussine, était appelé à une vie meilleure après quelques jours de maladie. C’était un prêtre de foi vive, de profonde piété, de zèle éclairé et entreprenant, d’une grande bonté d’âme et d’une remarquable énergie de caractère. Sa mort est une douloureuse épreuve pour le Su-Tchuen Méridional.
Jean-Edouard Doussine naquit à Saint-Vincent, sur les confins du Béarn (diocèse de Bayonne), à 12 kilomètres de Lourdes et de Bétharram, d’une famille véritablement chrétienne que la Vierge de Massabielle avait favorisée d’une miraculeuse intervention et entourée d’une protection maternelle. Sa jeunesse s’écoula dans une atmosphère tout imprégnée de surnaturel, et sa vocation au sacerdoce put éclore spontanément et se développer à son aise, dans un milieu où les aspirations se dirigeaient d’elles-mêmes vers Dieu et vers la Vierge Immaculée.
Dès son enfance, le jeune Edouard fut consacré par sa pieuse mère à Notre-Dame de Lourdes, et, à l’âge de deux ans, confié aux soins des Religieuses de Saint-Joseph qui avaient une école dans la paroisse. L’enfant montra une intelligence vive, mais alliée à un caractère difficile, à une indépendance et à une obstination de volonté extraordinaires.
De violentes passions bouillonnaient dans son jeune cœur. Sa mère lui donne un jour un morceau de pain plus petit que celui qu’elle vient de donner à son frère aîné : l’enfant est exaspéré d’avoir été servi le dernier, exaspéré d’avoir reçu une moindre portion ; et, de colère, il le jette à terre et refuse de le ramasser. Dans une autre circonstance, pour ne pas se soumettre à une correction, il se cache deux jours dans une grange, où il vit de quelques fruits pris à la dérobée : « Tuez-moi ! répond-il encore à son père, qui lui commande un léger travail ; tuez-moi ! Mais je n’obéirai pas ! »
Une pareille obstination ne laissait pas que de préoccuper la famille : que serait l’avenir d’un enfant aussi volontaire !
En octobre 1881, Edouard Doussine entrait à l’école des abbés Dupont, à Nay. Il s’y révéla élève studieux et appliqué ; il prit de suite la tête de sa classe et conquit la plus grande partie des prix scolaires. Mais, ardent, impétueux, il mérita aussi de nombreuses punitions. Sa loyauté était telle qu’il préférait subir une correction plutôt que de dénoncer un camarade coupable.
Finalement, son caractère entier se buta, et les deux dernières années passées à Nay furent à peu près perdues au point de vue des études. Edouard suivait à peine sa classe : un changement d’école s’imposait, car l’enfant s’obstinait à ne pas vouloir travailler.
En 1888, après sa troisième, il arrivait au Petit Séminaire de Saint-Pé, dans le diocèse de Tarbes. Il fut présenté au Supérieur de l’établissement comme un élève dissipé, d’une nature exceptionnelle. Mais, quand ses parents vinrent le voir pour la première fois, le Supérieur leur donna ce consolant témoignage : « Edouard est doux comme un ange ; c’est un modèle ! » Disons qu’une neuvaine de prières avait été faite à Notre-Dame de Lourdes : la réponse du bon Dieu ne s’était pas fait attendre. La conversion fut complète, radicale, et le caractère définitivement modifié, à la grande joie de tous : professeurs et élèves lui accordèrent des marques d’encouragement et de sympathie.
M. Doussine entra au Grand Séminaire de Bayonne en 1890. Deux ans plus tard, le 17 juillet 1892, il recevait la tonsure ; l’année suivante, 16 juillet 1893, les deux premiers ordres mineurs, et le 14 juillet 1895, les deux derniers. Il laissa dans cette maison d’ex-cellents souvenirs.
Son service militaire (1893-1894) fut accompli à Pau. Le séminariste-soldat ne perdit pas de vue sa qualité d’aspirant au sacerdoce : il vécut d’une vie de foi au milieu des préoccupations matérielles de la caserne. Son capitaine, qui lui avait confié ses enfants pour qu’il leur donnât des leçons, lui offrit de l’exempter des manœuvres : « Oh ! non, répondit le futur missionnaire : le Christ a porté la Croix ; je puis bien porter le sac. » Il fit plus : généreusement il partagea ses ressources personnelles avec des camarades plus pauvres.
Depuis quelque temps, M. Doussine songeait sérieusement à consacrer sa vie à l’apostolat auprès des infidèles. Durant les vacances qui suivirent sa quatrième année de grand séminaire, sa mère, le voyant une fois tout pensif, lui dit :
— Tu as quelque chose... ; et il me semble deviner ce qui te préoccupe ; tu veux entrer, n’est-il pas vrai, dans un ordre reli¬gieux?
— Eh bien ! oui, répondit-il ; je puis bien vous le dire, puisque vous le devinez : je veux aller aux Missions-Etrangères de la rue du Bac, si vous voulez bien me le permettre.
Ces parents chrétiens n’hésitèrent pas à faire au bon Dieu le sacrifice de leur fils ; le 10 septembre de la même année, il arrivait à Paris. Il fut, aspirant-missionnaire, ce qu’il avait été séminariste à Bayonne, pieux, généreux au service de Dieu, travailleur, animé d’un esprit de charité et de bonté qui lui concilia les sympathies de ses Confrères.
Le 27 septembre 1896, il recevait le sous-diaconat ; le 13 mars suivant, le diaconat et le 27 juin 1897, la prêtrise, avec sa destination pour le Su-Tchuen Méridional.
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Nous manquons de détails pour suivre notre regretté Confrère dans les différents postes qu’il a occupés pendant les 14 années de son apostolat. Nous nous contenterons de mentionner qu’il fit son apprentissage sous la direction de M. Castanet, dans les rudes districts du Kien-Tchang, et de reproduire quelques notes envoyées par un de ses Confrères, dont l’intention, dit-il lui-même, « n’est pas de faire une notice biographique du défunt, dans l’espoir que quelqu’un de ses amis y suppléera. »
La foi était, chez M. Doussine, une seconde nature et produisait une piété forte, simple, sans affectation. Il s’acquittait de ses de¬voirs religieux avec régularité et sans effort. Sa grande activité lui faisait mener de front une foule d’occupations ; mais, dès qu’il avait pris son bréviaire ou se trouvait au pied de l’autel, il n’avait plus qu’une seule affaire présente et il s’en acquittait sans lenteur ni précipitation.
Il suffisait de le voir réciter régulièrement et dévotement son rosaire pour comprendre l’amour et la confiance qu’il avait envers la sainte Vierge.
Son zèle était admirablement servi par ses qualités naturelles. Il était si affable, si bon que personne ne lui résistait. A peine était-il dans un district depuis six mois que les conversions y abondaient. Il était, d’ailleurs, souvent en voyage pour visiter ses chrétientés naissantes et tâcher de fonder des écoles dans les principaux villa¬ges.
Pour soutenir ses néophytes, il ne négligeait pas leurs intérêts matériels : rarement, cependant, il recourait au mandarin ; son énergie et sa force de persuasion lui suffisaient pour arranger les cas les plus épineux. Que de braves gens lui doivent de la reconnaissance pour sa protection efficace ! Les épreuves ne lui manquèrent pas, et, sans refroidir son zèle, servirent à le rendre plus circonspect dans le règlement de ces querelles.
Sa charité s’étendait jusqu’aux corps. Les abords de sa chambre avaient l’aspect d’un véritable dispensaire, où, tous les jours, on voyait s’étaler un lamentable résumé des misères humaines. Sans manifester la moindre répugnance, il lavait, lui-même, les plaies les plus hideuses et y appliquait des remèdes, tout en donnant au patient des paroles d’encouragement et en l’exhortant à une vie chrétienne.
Dès son arrivée à Lou-Chan, où il était depuis plus d’un an quand la mort est venue le surprendre, deux choses lui furent particulièrement à cœur : une chapelle convenable et une école pour les femmes. En l’autorisant à entreprendre ces travaux, son Evêque en fit un homme heureux. La mort ne lui a pas permis de les voir terminés ; mais on peut dire qu’il en jouissait par anticipation.
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Son activité, secondée par une santé florissante, faisait espérer une longue et fructueuse carrière : aussi, ce fut dans toute la Mission un saisissement de stupeur générale, quand le télégraphe an¬nonça son décès. Dieu l’avait jugé mûr pour la récompense et le Missionnaire ne se présentait pas devant Lui les mains vides : il avait successivement administré plusieurs districts, où il a laissé d’impérissables souvenirs.
Ce cher Confrère, qui n’avait jamais été sérieusement malade, négligeait beaucoup sa santé. Son esprit de mortification le rendait très dur à lui-même.
Vers la fin du mois de mars 1911, M. Doussine fut atteint d’un grave accès de fièvre. Avant d’être suffisamment rétabli, il voulut visiter une nouvelle station où il avait deux écoles : son mal s’aggrava considérablement dans ce voyage.
Il s’arrêta dans une famille de néophytes : fatigué par la marche qu’il venait de faire, brûlé par la fièvre, il but une grande quantité d’eau froide et commit encore l’imprudence d’aller chercher un peu de fraîcheur dans un jardin où il s’attarda longtemps. Le lendemain, une pneumonie se déclarait. Il fit immédiatement appeler M. Gire, qui se rendit en toute hâte à Lou-Chan, où il trouva le malade très affaibli.
« Il fit un pas au-devant de moi, écrit M. Gire, et, en m’embrassant, il m’exprima, d’une voix mourante, sa joie et sa reconnaissance de mon arrivée. Voyant qu’il parlait avec beaucoup de difficulté, et craignant que son état ne s’aggravât pendant la nuit, je lui parlai des derniers sacrements : il me répondit qu’il serait plus dispos le lendemain matin. Je n’insistai pas, car le danger ne paraissait pas imminent. Mais, vers les deux heures après minuit, je crus devoir lui proposer de nouveau l’Extrême-Onction : il la reçut avec une joie visible et une grande piété, répondant à mes ques¬tions, quoique avec beaucoup de peine.
« Dans la journée du 5 avril, il se trouva beaucoup mieux. L’amélioration parut encore s’accentuer le jour suivant, de sorte que mes craintes commençaient à disparaître.
Dans la soirée, M. Roux, à qui j’avais fait porter la nouvelle de l’état du malade, arrivait à Lou-Chan, mais seulement pour assister aux derniers moments de notre Confrère.
« Dans la nuit du 6 au 7 avril, la fièvre se déclara de nouveau, extrêmement violente ; le malade était très agité. Vers midi, il fut pris d’un mouvement convulsif de la mâchoire inférieure et se mit à articuler des sons monotones, sans signification. Puis vint le délire, et nous eûmes la tristesse d’assister, impuissants, pendant quelques heures, à une scène à la fois tragique et lugubre : à pleins poumons, le pauvre moribond chantait et débitait des paroles inintelligibles. Les yeux brûlés par la fièvre, le corps en transpiration, il était dans un état d’extrême exaltation.
« Nous lui suggérions de pieuses invocations, qu’il semblait comprendre et s’efforçait de répéter : mais le délire le ramenait promptement à l’espèce d’hallucination qui l’obsédait.
« A la tombée de la nuit, épuisé par l’effort, il s’affaissa. La voix devint moins sonore, et, soudain, il s’arrêta comme si une autre idée avait pris possession de son esprit. Il reçut, en cet état, l’indulgence plénière et une dernière absolution, et, pendant que, à son chevet, nous récitions les prières des agonisants, et que les chrétiens, dans une salle voisine, recommandaient leur père spirituel tant aimé au Dieu des miséricordes, son âme s’envola doucement vers le Ciel en un soupir à peine perceptible. »
C’était le vendredi 7 avril, fête des Sept-Douleurs de la très sainte Vierge, à 7 h. 20 du soir. Marie Immaculée appelait en ce jour à la récompense le fidèle serviteur dont la vie s’était consumée à faire connaître aux malheureux infidèles le mystère d’un Dieu mort en croix pour le salut des hommes.
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References
[2289] DOUSSINE Jean (1874-1911)
Notes bio-bibliographiques. - C.-R., 1902, p. 113 ; 1910, p. 81. - M. C., xl, 1908, p. 364 ; xliii, 1911, p. 124. - A. M.-E., 1909, pp. 38, 39. - Rev. rel. Bayonne, 1911, Sa mort, p. 611.
Notice nécrologique. - C.-R., 1911, p. 344.