Laurent MARCADÉ1883 - 1974
- Status : Prêtre
- Identifier : 2929
Identity
Birth
Death
Other informations
Missions
- Country :
- China
- Mission area :
- 1907 - 1914 (Shenyang [Moukden])
- 1918 - 1951 (Shenyang [Moukden])
Biography
[2929] MARCADÉ Laurent est né le 17 août 1883 à Crédin (Morbihan). Il entre au Séminaire des Missions Étrangères en 1901et part le 6 décembre 1906 terminer ses études à Penang,.Il est ordonné prêtre le 10 mars 1907. Il quitte Penang le 14 avril suivant pour la mission de Moukden (Mandchourie). Il est chargé du poste de Newchwang en 1909. Mobilisé en France de 1914 à 1918, il est ensuite envoyé dans le district d’I-tcheou. En 1934, il s'établit à Liaoyang, de 1938 à 1946 il dirige la communauté chrétienne de Kaiping. En 1950, il est nommé chef du district de Heishan mais ne peut rejoindre son poste. Expulsé de Chine en 1951, il rentre en France. Il est envoyé à la résidence de Lille. En 1952, il accepte un poste d’aumônier à Draguignan. En 1959, il se retire au sanatorium Saint-Raphaël de Montbeton. Il meurt le 30 mai 1974. Il est inhumé dans le cimetière des MEP.
Obituary
Le Père Laurent MARCADÉ
Missionnaire en Mandchourie (Chine)
1883 - 1974
Né le 17 août 1883 à Crédin ; diocèse de Vannes.
Prêtre à Penang le 10 mars 1907.
Entré aux Missions Etrangères en septembre 1903.
En mission à Moukden de 1907 à 1951.
Rentré en France en 1951.
Décédé à Montbeton le 30 mai 1974.
« Quelle espèce de fils veux-tu ? »
Le Père Laurent MARCADÉ naquit à Crédin (diocèse de Vannes) le 17 août 1883. Il était le deuxième enfant d’une famille modeste mais très chrétienne. Après ses études primaires à l’école de Crédin, il alla faire ses études secondaires en Touraine. Il fut, en effet, confié par sa famille à un oncle, curé à cette époque dans le diocèse de Tours. Ses études terminées, il demande à ses parents la permission d’entrer aux Missions Etrangères de Paris. A sa mère qui lui faisait quelque objection, il répondit : « Maman, quelle espèce de fils veux-tu : un missionnaire ou un brigand ? » Il est possible que son séjour en Touraine où il entendit certainement parler de Mgr Pallu et de la Société ne fut pas étranger à sa décision. Il entra donc aux Missions Etrangères en septembre 1903.
A cette époque, le départ, le vrai départ, était celui qui, arrachant à sa famille le futur missionnaire, l’amenait tout d’abord à Paris puis, quelques années après. sans regard en arrière, dans la mission qui lui était assignée. Son sacrifice une fois commencé, Laurent Marcadé se trouva tout à fait à son aise au séminaire. Nullement déconcerté par ce nouveau mode de vie, il sut même, dès les premiers jours, grâce à sa légendaire bonne humeur, remonter le moral de ceux de ses nouveaux confrères auxquels l’adaptation demandait plus d’efforts. Fort bien doué, il parcourut sans difficulté le cycle des études cléricales et c’est ainsi sans difficulté qu’il fut admis aux ordres sacrés. Il fut ordonné sous-diacre en décembre 1905.
Un « Penangais » à Moukden
Il se voyait déjà « partant » lorsque fut décrétée la loi « les curés sac au dos » qui faillit faire tout rater ou du moins retarder et son ordination sacerdotale et son départ. Il n’était pas le seul dans le cas. C’est alors qu’on décida d’envoyer les sous-diacres à Penang pour y achever leurs études et y être ordonnés prêtres, le moment venu. C’était en 1906. Il partit donc pour Penang, acheva là ses études et fut ordonné prêtre le 10 mars 1907. C’est là aussi qu’il reçut sa destination pour la Mandchourie méridionale. Il partit pour sa mission le 15 avril 1907.
Beaucoup plus étendue que l’actuel archidiocèse de Moukden, cette mission se partageait, avec celle de Kirin, toute la Mandchourie, grande elle-même comme trois fois la France. Elle venait d’être le théâtre d’événements sanglants, l’insurrection des Boxers qui avait coûté la vie à sept de nos confrères, trois prêtres chinois. deux religieuses européennes et à des centaines de fidèles, dispersant tous les autres et laissant en ruine la moitié de nos édifices : églises, résidences, écoles... C’est dire que le travail n’y manquait pas. Ce furent des années d’un labeur intense et fécond auquel prit une large part le jeune et solide Marcadé, ignorant les rigueurs du climat et faisant ses délices des longues chevauchées dans un pays qui ne connaissait encore ni chemin de fer ni route digne de ce nom.
Toujours avec la même facilité, il eut tôt fait de pénétrer les arcanes de la langue chinoise qu’il parlait avec élégance et facilité. La langue écrite, à l’époque assez peu cotée dans certains milieux missionnaires, ne résista pas davantage au labeur acharné du jeune missionnaire. Il lui arriva même de citer dans ses sermons des passages des « Quatre Livres », alors base de l’enseignement dans les écoles, au grand ébahissement des auditeurs qui. pour la plupart, bons paysans sans beaucoup de culture, auraient été bien incapables d’en faire autant.
La guerre 14-20
Vint la guerre — la première — et le voilà mobilisé, à Tientsin tout d’abord, puis dans les rangs des interprètes accompagnant en France les Chinois volontaires recrutés pour le travail dans nos usines de guerre. Un vrai « filon », comme il aimait à dire. Contrôle postal, travail assez fastidieux à la longue surtout, mais sans contrainte ni responsabilité et sans autre souci que celui de se voir ainsi si loin de sa patrie d’adoption et astreint à une tâche si peu en rapport avec sa belle vocation.
La guerre terminée, il se vit retenu sous les armes plusieurs mois encore. Il accompagna, toujours à titre d’interprète, l’expédition des forces alliées allant au secours des « Blancs » qui, sous le commandement du général Wrangel, luttaient depuis des mois pour arrêter l’avance des « Rouges » en Sibérie : cette opération avait pour base et centre de ralliement la ville russo-chinoise de Kharbin en Mandchourie, où le lieutenant Marcadé ne se trouvait nullement dépaysé.
Un confrère sociable
Le voilà de retour. Nous sommes en 1920. Sous la houlette d’abord de Mgr Choulet, puis un peu après, de Mgr Blois, il se vit successivement à la tête de plusieurs importants districts où, riche d’une belle expérience, il donna libre cours à son zèle et à son savoir-faire, rehaussés l’un et l’autre d’un bon sens et d’un « tout à tous » qui ne connurent jamais d’éclipse. Car, si quelqu’un était « ouvert au monde », comme on dit à présent, éminemment sociable, ce fut bien lui. On n’oubliera jamais son accueil, son bon sourire, son ton de voix empreint de bonhomie, son humour toujours prêt à jaillir sous forme d’un bon mot sans jamais franchir les limites de la bienséance ni égratigner le prochain, dispositions naturelles combien précieuses, qui lui valurent parfois de se tirer d’affaire là où d’autres, avec plus de logique et de rigueur, n’auraient pas si bien réussi. Témoin l’anecdote suivante, une seule parmi beaucoup d’autres.
C’était pendant les mornes années du Mandchoukuo. Un jour qu’avec les confrères voisins, il avait célébré, un peu bruyamment peut-être, la saint Laurent, il reçut dans la soirée la visite d’un policier japonais qui voulut à tout prix avoir l’explication de ce joyeux rassemblement. Le Père, assez embarrassé pour lui expliquer ce qu’est pour nous une fête patronale, crut bien faire de répondre : « Nous fêtions mon anniversaire ». Fort bien, mais ce monsieur ne se le tint pas pour dit et alla de ce pas, on ne sait ni où ni comment, prendre ses renseignements et revint peu après disant au Père sur un ton rien moins que conciliant : « Vous m’avez trompé : votre anniversaire, ce n’est pas aujourd’hui ». Il faudrait n’avoir pas connu le Père Marcadé pour croire qu’il allait se trouver à court. « C’est vrai, dit-il, mais, vous savez, c’est un peu compliqué. J’ai dit comme cela pour simplifier car, autrement, vous n’auriez pas compris ». Horreur ! A-t-on jamais entendu chose parelle ? Un Japonais incapable de comprendre ! ! ! Insultes et menaces ne lui furent pas ménagées, mais n’eurent pas raison de son impassibilité, si bien que peu à peu, moins convaincu par des raisonnements que désarmé par le calme et la cordialité du Père, le tout accompagné, c’est-à-dire « arrosé » copieusement grâce aux reliefs du repas de midi, notre homme finit par faire marche arrière puis par capituler, et l’incident prit fin sur une bonne poignée de main. On dit même, mais je n’en jurerais pas, que par la suite ils devinrent une paire d’amis.
Aussi peu formaliste que possible, ignorant toute recherche dans sa tenue comme dans ses usages, l’exactitude n’était pas son fort ; mais s’agissait-il d’un service à rendre, d’une misère à soulager et mieux, des devoirs de son ministère, rien n’aurait pu arrêter son zèle ni mettre un frein à son dévouement, comme aussi rien dans son attitude ne laissa jamais supposer qu’il peut se sentir animé du désir de paraître. Il en est que rendent célèbres des œuvres, des fondations, des réussites, voire des succès qualifiés d’apostoliques... Chez lui, ce ne fut pas le cas. Célèbre en un sens, il le fut, mais d’une tout autre manière et comme à son insu, tout naturellement par sa personne même, son genre inimitable, sa simplicité, sa franchise et toutes les belles qualités du cœur qui lui valurent non seulement l’estime et l’admiration des confrères, mais une renommée qui s’étendit bien au-delà de son entourage.
La guerre en Mandchourie
Mais le temps passe, les années se succèdent et les événements se déroulent sans jamais apporter à cette pauvre Mandchourie une paix durable et propice à l’apostolat : guerre civile, guerre étrangère, puis guerre civile encore... Pour ne parler que des dernières années, l’armistice signé, les Japonais rentrés chez eux, nous voilà cette fois sous la botte des Russes, bientôt relevés, il est vrai, par l’armée dite nationaliste ; à partir de ce jour, le désordre latent connut une recrudescence qui ne prit fin qu’avec l’arrivée de l’armée rouge et la mainmise sur tout le pays par le régime que l’on sait.
Mais, bien avant ce triste dénouement, notre cher Père Marcadé, déjà marqué par l’âge, les nerfs bien éprouvés par l’inaction forcée, la tension, les dangers, l’incertitude et la perspective d’un avenir plus ou moins rassurant, d’abord réfugié à l’évêché, finit par se résoudre à fuir cet enfer. Il demanda et obtint sans peine l’autorisation de nous quitter pour aller au pays natal respirer un air plus sain sous un ciel plus clément.
Il était temps. C’est peu après son départ en effet que se dressa entre le monde libre et le monde libéré l’impitoyable rideau de fer qui, dès lors et jusqu’à son dernier jour, le tint dans l’ignorance du sort de ses nombreux amis restés là-bas, dans un pays auquel, malgré le temps et la distance, il resta toujours profondément attaché.
Les dernières années
Rentré en France au mois de juin 1951, il prit une temps de repos pour refaire sa santé ébranlée. Au mois d’août 1952, il prit le poste d’aumônier des Petites Sœurs des Pauvres à Draguignan où sa sœur, plus jeune que lui était carmélite. il remplit cette fonction pendant quelques années puis, en 1959, se retira à Montbeton. En 1968, il fut obligé de s’abstenir de célébrer la messe, car sa vue avait très fortement baissé. Malgré les visites des confrères et les lectures qu’on lui faisait, il devait trouver le temps long. Il passait ce temps en priant et « en parlant, disait-il, avec la sainte Vierge » dont il avait une statue sur sa table.
Au début de 1974, son état de santé commença à se détériorer sérieusement en même temps que ses facultés s’affaiblissaient lentement. A partir du mois de mai, il dut garder le lit : ce qui lui occasionna de grandes souffrances. Le 30 mai au soir, il prit son repas à peu près comme d’habitude. A 9 heures, le Père Bouchut jeta un coup d’œil dans sa chambre et le trouva reposant normalement. A 10 heures 15, le Père Dewonck alla le voir et le trouva à l’agonie. C’est vers 23 heures 45 qu’il s’éteignit paisiblement. Il repose au milieu des confrères à Montbeton, avec plusieurs autres, missionnaires comme lui en Mandchourie.
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