Eugène BOYER1879 - 1930
- Statut : Prêtre
- Identifiant : 2823
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Identité
Naissance
Décès
Missions
- Pays :
- Inde
- Région missionnaire :
- 1905 - 1930 (Pondichéry)
Biographie
[2823] Guillaume, Eugène BOYER naît le 19 février 1879 dans le diocèse de Clermont-Ferrand à Arlanc, paroisse Saint Pierre, dans le Puy-de-Dôme, non loin de la Chaise-Dieu. De 1894 à 1898, il est élève à l'Institution Saint-Pierre à Courpière dans le même département. Puis il se dirige vers le grand séminaire de Clermont où pendant deux ans il fait ses études de philosophie.
Le 8 novembre 1900, il entre laïc au séminaire des Missions Étrangères. Tonsuré le 20 septembre 1901, minoré le 7 mars 1903, sous-diacre le 27 septembre 1903, diacre le 27 février 1904, ordonné prêtre le 26 février 1905, il reçoit sa destination : l'archidiocèse de Pondichéry. La maladie retarde quelque peu son départ qui n’intervient que le 26 avril 1905.
Peu après son arrivée en Inde, le P. Boyer est envoyé dans le vaste district (1) de Chetpet dans le Nord Arcot (2), chez le P. Jean Darras. Quelques temps après, ce dernier emmène le jeune missionnaire au village de Budamangalam, l'y installe et l'y laisse seul. Le P. Guillaume Boyer y reste pendant 25 ans, jusqu'à sa mort.
25 ans d’apostolat dans le même lieu
Dès son arrivée en 1906, le P. Boyer ouvre une petite école. En 1909, détaché de Chetpet, Budamangalam, qui compte deux mille trois cents Chrétiens, est élevé au rang de district. Son école commençant à prospérer, il ouvre un cours d'adulte pour les jeunes parias désireux d'apprendre à lire et à écrire. En 1920, il écrit : "l'horizon peut être sombre, mais je reste optimiste". Il souhaite créer des banques rurales pour ses chrétiens, mais hélas ! il n’en a pas les moyens. L'année suivante est normale ; il n'y a pas de famine. L'esprit chrétien s'affermit, mais ses chrétiens montrent peu d'empressement quand il s’agit d’inscrire leurs enfants à l'école.
L’attention portée à l’enseignement
Terrien d'origine, le P. Guillaume Boyer s'attache à fixer ses fidèles sur les terres voisines de sa résidence. Ainsi, il fonde à Budamangalam une colonie où il s’efforce de les regrouper de façon qu’ils puissent s'épanouir dans leur foi. Cependant, en 1922, il regrette de n'avoir pas encore pu ramener à l’Eglise les Intouchables apostats qui représentent une bonne moitié de sa chrétienté. Plus satisfaisant, cependant, leurs enfants fréquentent l'école et eux-mêmes s'adressent à lui en maintes circonstances.
En 1925, Mgr Morel se trouve dans la nécessité d'adjoindre un district voisin à celui de Budamangala. Le P. Boyer, malgré une santé qui commence à décliner, voit doubler son travail. En 1926, les chrétiens de Vellantangal et de Narasampattu refusent fermement qu’un pasteur protestant américain s’installe chez eux.
En 1928, le district civil de North-Arcot, dont fait partie Budamangalam, est détaché de l'archidiocèse de Pondichéry et rattaché à celui de Madras. Il est dès lors confié aux PP. Salésiens. Ces derniers n'étant pas en nombre suffisant, Le P. Boyer continue à desservir les deux districts ecclésiastiques dont il a la charge. En 1929, la montée de l'émigration retient son attention et il écrit:…" Du seul district de Vellantangal, il y a plus d'un millier de chrétiens qui ont émigré et sont maintenant dispersés de tous les côtés dans les plantations soit du sud de l'Inde, soit de Ceylan, soit de Malacca…Les salaires sont alléchants et le travail peu pénible."
Tout au long de sa mission apostolique, le P. Boyer, bien qu’extérieurement rude, apparaît comme un homme bon, patient et tenace sachant faire face aux déboires et aux difficultés. D'une terre aride, il sait faire un sol fécond. Il met grand espoir en l'école au point que,.quelques mois avant sa mort, il en ouvre une nouvelle dans un village non chrétien.
À la fin de juin 1930, affaibli par quelques vingt-cinq furoncles et un diabète aigu, il se laisse persuader d'aller se soigner à l'hôpital Sainte Marthe à Bangalore. Il y est conduit par le P. Joseph Monchalin. Le 25 juillet 1930, il demande à recevoir les derniers sacrements. C'est là que le lendemain, à 13h45, il s'éteint doucement.
Le 27 juillet 1930, ses obsèques présidées par Mgr. Colas, ont lieu à l'église cathédrale de Bangalore.
1 – Il s’agit très vraisemblablement d’une circonscription ecclésiastique à distinguer des districts administratifs.
2 – North Arcot est à cette époque un district administratif, qualifié plus bas de district civil. Il se situe géographiquement entre Madras (Chennai) et Bangalore, en territoire tamoul.
Nécrologie
M. Eugène Boyer naquit le 19 février 1879 à Arlanc, au diocèse de Clermont, à quelques kilomètres de la Chaise-Dieu. Auvergnat bien authentique, et Dieu sait s’il en était fier ! il n’oublia jamais les montagnes natales ; robuste et laborieux, doux et tenace, la parole aimable, des yeux très bons dans une face hirsute, il était bien le type du montagnard du Plateau Central.
Il fut élevé à l’Institution Saint-Pierre à Courpière de 1894 à 1898, puis il entra au Grand Séminaire de Clermont-Ferrand. Une conférence donnée à Courpière par un Evêque missionnaire avait déjà éveillé en lui la vocation apostolique ; aussi, ses deux années de philosophie terminées, quittait-il Clermont pour rejoindre le cher vieux Séminaire de la rue du Bac. Les Missions-Etrangères firent ce jour-là une excellente recrue. Eugène Boyer fut heureux dans ce nouveau milieu, il s’y sentait comme chez lui et les lettres qu’il écrivait à un de ses amis resté au pays témoignaient qu’il appréciait vraiment son bonheur. Une maladie retarda son départ en Mission jusqu’en 1905 ; ce fut pour lui une grosse épreuve : voir partir les amis, rester prisonnier du médecin, cela était bien dur ! Plus tard il parlait de cette épreuve sans amertume, d’abord pour prouver que les médecins ne sont pas infaillibles, ensuite et surtout pour bénir la Providence qui sans doute avait voulu, en lui imposant ce retard, éprouver sa vocation au bénéfice de son ministère futur.
Destiné à Pondichéry, M. Boyer arriva dans l’Inde le 26 avril 1905. Quelques mois plus tard, il était envoyé dans le vaste district de Chetpet pour y tenir compagnie au vénéré M. Darras, le grand convertisseur du North-Arcot. A peine le temps de souffler, et voilà que M. Darras, qui jusque dans sa verte vieillesse conservait encore du vif-argent dans ses veines, l’emmène, à bonne distance, dans le village de Budamangalam ; il l’y installe, l’y laisse seul, tout seul, en pleine brousse, en plein pays païen, en plein rêve ! Il y resta jusqu’à sa mort, durant vingt-cinq ans. Certes la place était idéale pour un prêtre zélé : le territoire du district était vaste, peuplé d’innombrables païens, avec environ quinze cents chrétiens dispersés, baptisés par M. Darras, mais dont l’instruction laissait certainement à désirer. Il fallait de toute nécessité parfaire l’œuvre commencée par le vieux missionnaire, stabiliser et fortifier les résultats acquis, puis si possible, reprendre la marche en avant. Telle était la consigne laissée par le grand convertisseur à son jeune disciple.
L’œuvre était belle assurément, mais difficile : M. Boyer s’y appliqua de tout cœur et y réussit. Patience et longueur de temps font plus que force ni que rage ; il fut patient et malgré les déboires, les difficultés, les contradictions même, il fut tenace ; d’une terre aride, il fit un sol fécond, disons qu’il fit fleurir le désert. En 1906, l’assistance à la messe était misérable, en 1930 la chapelle est bien restée la même, mais bon nombre de fidèles, n’y trouvant pas de place, assistent à la messe dominicale du haut des rochers voisins !
En matière d’apostolat, si le but est le même pour tous, les moyens à employer peuvent et doivent varier suivant les lieux et les circonstances. Terrien d’origine, c’est à la terre que M. Boyer demandera le secours nécessaire pour maintenir et perfectionner son troupeau dans la foi. Malgré la réputation des richesses fabuleuses que lui ont faite les romanciers aux environs de 1830, l’Inde est et restera longtemps encore le pays de la famine. Le missionnaire n’oublia pas qu’il faut vivre tout d’abord avant de philosopher ; il fixa ses chrétiens sur les terres voisines de sa résidence, appela et établit à Budamangalam d’anciens chrétiens plus solides, plus fermes dans la foi, qui servirent d’exemples aux nouvelles recrues. De la sorte se forma une colonie chrétienne, sans mélange de paganisme, où la vie chrétienne put se développer, s’épanouir. Cette œuvre demandait des ressources, de grandes ressources ; le missionnaire en trouva, mais au prix de quelques peines ! Il se fit mendiant, écrivit de tous côtés, frappa à toutes les portes, supplia tout le monde, amis et inconnus. Et si sa main gauche était toujours tendue pour recevoir, sa main droite était toujours ouverte pour donner : on en sait quelque chose à Budamangalam, et, on ne l’oubliera pas de si tôt.
M. Boyer avait foi dans l’apostolat par l’école. Il sema des écoles dans tout son district ; quelques mois avant sa mort, il en ouvrait encore une dans un village absolument païen. Cet homme extérieurement rude adorait les enfant ; il était pour eux d’une mansuétude infinie, car les enfants sont 1’avenir, et former les enfants c’est assurer l’avenir.
En 1925, Mgr Morel, vu la pénurie de missionnaires, se vit dans la nécessité d’adjoindre au district de Budamangalam un district voisin ; M. Boyer dut faire face à un travail doublé et se déplacer continuellement. Mais sa santé commençait à décliner ; peut-être aurait-il pu, en prenant quelque repos, réparer des forces qui s’épuisaient, mais il ne voulait pas de repos, il n’en prit jamais.
En 1928, le district civil de North-Arcot, dont fait partie Budamangalam, est détaché de l’Archidiocèse de Pondichéry pour être rattaché à celui de Madras, confié récemment aux PP. Salésiens de Dom Bosco. Grande douleur pour M. Boyer, qui se voit à la veille de quitter son cher troupeau. Seulement les PP. Salésiens ne sont pas en nombre suffisant et provisoirement le missionnaire garde Budamangalam… C’est une consolation, sans doute, mais il n’en reste pas moins avec deux districts à desservir. A faire la navette entre les deux, il finit par s’user, tant et si bien que sur la fin de juin 1930 il fut à bout de forces. Les confrères voisins le décidèrent, non sans peine, à partir pour l’hôpital Sainte-Marthe à Bangalore ; il y fut conduit par M. Monchalin. Couvert d’énormes furoncles, dont on compta jusqu’à vingt-cinq, il était très affaibli. Le premier examen montra clairement qu’il souffrait d’un diabète aigu, maladie très fréquente dans l’Inde et dont l’issue est fatale.
Tous les soins possibles furent prodigués à notre cher confrère, soit par les si dévouées Sœurs de l’hôpital, soit par l’aimable docteur chrétien qui le visitait deux fois par jour. Chaque matin, l’aumônier lui apportait la sainte communion ; chaque jour, il recevait la visite de l’un ou l’autre des confrèses de la ville, toujours parfaitement charitables pour les malades de l’hôpital. A partir du 21 juillet, il fut encore consolé par les visites de son ancien com¬pagnon de Chetpet, Mgr Colas, récemment appelé par le Saint-Siège à l’Archevêché de Pondichéry, et de M. Chaler, qui avait été son voisin de district pendant vingt-cinq ans.
Le 25 juillet, à cinq heures et demie du soir, le cher malade demanda lui-même l’Extrême-Onction. S’adressant à Mgr Colas : « Je me sens un peu plus mal, dit-il, je désirerais recevoir « les derniers sacrements. Voudriez-vous d’abord rester quelques instants seul avec moi pour « arranger mes affaires ? » Ainsi fut fait. Le Saint Viatique lui fut donné et, après quelques paroles l’exhortant à offrir sa vie et ses souffrances pour les siens, pour ses chrétiens, pour le diocèse et pour la chère Société des Missions-Etrangères, Sa Grandeur lui administra le sacrement des mourants. Bien ému, notre mourant répondait aux prières auxquelles s’unissaient deux Pères Carmes, MM. Clément, Chaler, Blons et Fluchaire, et la Religieuse garde-malade. Dès lors il parla peu et, le lendemain 26 juil¬let, à une heure trois quarts de l’après-midi, il s’éteignait doucement, sans agonie, et allait recevoir la récompense promise au bon serviteur.
Les obsèques eurent lieu le lendemain à l’église cathédrale de Bangalore. Mgr Colas, quatre confrères de Pondichéry, tous les confrères de Bangalore, les communautés religieuses, y assistaient.
La mort de M. Boyer avait été simple comme avait été sa vie ; simple et bon, il l’avait toujours été ; chez lui, nulle recherche de soi-même, nul désir de briller, ni de s’affirmer ; charité parfaite à l’égard des confrères qu’il aimait à recevoir et à visiter ; bonté et douceur avec tous, chrétiens et païens, qu’il ne brusquait jamais, ni en paroles, ni en actes : telles furent les qualités distinctives de M. Boyer. Il a passé en silence en faisant le bien : les chrétiens pleurent un père aimant et dévoué ; ses confrères regrettent un ami des bons et des mauvais jours. La Mission de Pondichéry a perdu un bon missionnaire. Tous, nous en avons la douce confiance, ont un protecteur de plus dans le ciel.
Références
[2823] BOYER Eugène (1879-1930)
Références biographiques.
AME 1906 p. 375, 1908 p. 56, 1930 p. 218+.
CR 1905 p. 288, 1906 p. 233, 1909 p. 228, 1919 p. 108-09, 1920 p. 75, 1921 p. 122, 1922 p. 146, 1926 p. 148, 1928 p. 150, 1929 p. 200, 1930 p. 223+310.
BME 1934,p. 243.
EC1 149, 153, 203+.
MC 1916 p. 15, 1917 p. 39-40.