René POURIAS1843 - 1884
- Status : Prêtre
- Identifier : 0994
Identity
Birth
Death
Other informations
Missions
- Country :
- China
- Mission area :
- 1868 - 1884
Biography
[0994] POURIAS, René-Ernest-Emile, vint au monde le 15 septembre 1843 à Saint-Martin-du-Bois (Maine-et-Loire). Il fit ses études au collège de Combrée, et, après un court séjour au grand séminaire d'Angers, entra laïque au Séminaire des M.-E. le 13 septembre 1865. Il reçut la prêtrise le 6 juin 1868, et partit pour le Yun-nan le 16 août de la même année. Il fut d'abord chargé du district de Kiu-tsin qui était assez vaste, car il s'étendait jusqu'à Houang-nghi-ho, à quatre jours de marche. Il résida à Tsao-kia-yn. Il établit définitivement dans son district l'œuvre de la Sainte-Enfance, construisit un orphelinat en 1870, fonda en 1871 la station chrétienne de Cha-ho, et un peu plus tard celle de Tang-ka-ten. Lui-même a raconté cette partie de sa vie, dans des pages intitulées Huit ans au Yun-nan, publiées en 1881 sans nom d'auteur, dans les Missions Catholiques, et ensuite en volume.
En 1876, il se rendit à Pékin où Mgr Ponsot l'envoyait traiter des intérêts de la mission ; de là, il alla au sanatorium de Béthanie, à Hong-kong. De retour au Yun-nan, il construisit, 1877-1878, la résidence épiscopale à Yun-nan fou. En 1881, il fut chargé d'administrer le district de Tong-tchouan ; en trois ans, il y fonda dix nouvelles stations. Il y bâtissait deux oratoires, lorsqu'il tomba malade. C'était en mars 1884 ; le 6 avril suivant, il mourut à Tong-tchouan.
Une parfaite connaissance des mœurs de la Chine, et une aptitude particulière pour négocier avec les mandarins lui avaient acquis estime et influence parmi les païens et les lettrés ; son zèle et sa piété édifiaient les chrétiens.
Obituary
M. POURIAS
MISSIONNAIRE APOSTOLIQUE DU YUN-NAN
Le dimanche des Rameaux (6 avril), la mission du Yun-nan perdait un de ses meilleurs ouvriers dans la personne de M. Pourias.
A la suite d’un accident, « la santé de notre cher confrère, écrit M. Ch. Séguin, avait été fortement ébranlée ; mais grâce aux excellents soins que le bon P. Patriat lui prodigua au Sanatorium en 1876, puis en 1880, il paraissait à peu près complètement rétabli. L’année dernière et cette année surtout, ses forces revenaient de jour en jour, et tout faisait espérer qu’il travaillerait longtemps encore au salut de nos pauvres montagnards. Mais Dieu en a jugé autrement. Il nous l’a enlevé au moment où nous nous y attendions le moins, et où il semblait le plus nécessaire au vaste et florissant district de Tong-tchouan-fou.
« C’est le 26 mars qu’il ressentit les premières atteintes du mal qui nous l’a ravi. Ce fut d’abord peu de chose, et comme il avait souvent éprouvé des indispositions de ce genre, il n’y fit pas beaucoup attention. Mais le jeudi 27, le malaise s’accentua. Vers 4 heures du soir, après s’être longtemps promené de long en large devant la maison, le cher Père entra tout à coup dans ma chambre. « Je me sens très mal, me dit-il, et comme on ne sait ce qui peut « arriver, je veux me confesser tout de suite (il l’avait fait depuis trois ou quatre jours), c’est « mon remède en pareille circonstance. » Après sa confession, il fut presque aussitôt pris de vomissements très douloureux. Il se mit au lit et demeura persuadé qu’il n’en relèverait pas ; la pensée de la mort ne le quittait plus. « C’est fini, disait-il en chinois aux catéchister qui le « soignaient, c’est fini, ma carrière est terminée ; cette fois il faut régler ses comptes. »
« La nuit qui suivit et la journée du lendemain furent très pénibles, mais le samedi, veille de la Passion, je le crus sauvé. Il se leva d’assez bonne heure, vaqua toute la journée à ses affaires accoutumées et n’alla se coucher qu’à 5 heures du soir. Mais le dimanche de la Passion, le mal reprit le dessus. Dans la soirée je m’aperçus que notre cher malade était en délire. Ses paroles n’avaient aucune suite. Je le quittai un instant pour aller présider la prière du soir ; quand je revins, le délire avait cessé. « Je suis bien malade, me dit-il alors, ne vous « êtes-vous pas aperçu tout à l’heure que j’étais en délire ? Vite, donnez-moi une nouvelle « absolution, car il pourrait se faire que je meure cette nuit, je sens que le délire revient. »
« J’entendis de nouveau sa confession, puis lui proposai l’Extrême-Onction, qu’il reçut en pleine connaissance, répondant lui-même aux prières. Lorsqu’il eut été administré, il me parut beaucoup moins abattu ; la nuit fut assez tranquille et le lendemain il y eut un mieux relatif, qui me fit concevoir de sérieuses espérances.
« Mais le mercredi de la Passion, ces espérances commencèrent à s’évanouir. Le délire revint plus fortement que jamais et continua les jours suivants avec quelques rares intervalles de lucidité parfaite, pendant lesquels il exprimait les sentiments de la plus vive piété et de la plus entière résignation. Parfois ses souffrances, vraiment terribles, lui arrachaient un mot de plainte : aussitôt il se reprochait ce mot comme une faute : « Non, non ! je ne veux pas me « plaindre ! Oh ! que le bon Dieu est bon ! Comme la souffrance éclaire et purifie ! Je ne « changerais pas ma position pour les plus belles du monde ! »
« Le samedi soir, il ne me reconnut plus. Il me prenait pour Mgr de Ténédos et me parlait comme à Sa Grandeur. Vers 8 heures, je lui annonçai que j’allais lui donner l’absolution et l’invitai en même temps à faire un acte de contrition et de conformité à la volonté de Notre-Seigneur ; je lui dis aussi de diriger son intention pour gagner les indulgences. Je crois qu’il me comprit, car il sembla se recueillir au moment où j’élevais la main.
« Cependant, d’heure en heure les progrès du mal s’accentuaient ; ils étaient rapides, effrayants : bientôt une sueur froide inonda son visage et tous ses membres : la mort arrivait à grands pas. « Cette nuit, disaient en pleurant nos dévoués catéchistes qui ne l’ont pas quitté un « instant, cette nuit, ou demain matin au plus tard, le Père va monter au Ciel ! »
« Hélas ! leurs prévisions ne devaient pas être trompées. Bientôt la respiration devint rapide et saccadée ; l’agonie commença vers 2 heures du matin. Je récite alors les prières du rituel, puis de temps en temps lui suggère à l’oreille quelque pieuse invocation. Tout à coup la respiration se fait moins bruyante et plus rare. Vite je lui donne une dernière absolution. A peine avais-je achevé la formule sacramentelle que le dernier soupir s’exhalait de sa poitrine. Il était 4 heures du matin.
« Deux heures après, les chrétiens arrivaient à la chapelle pour entendre la sainte Messe et assister à la bénédiction des Rameaux. Au commencement de la cérémonie, je leur annonçai la triste nouvelle. Des larmes silencieuses coulèrent de toutes les paupières ; mais quand, après la messe, on apporta dans la chapelle le corps revêtu des ornements sacerdotaux, la douleur longtemps contenue éclata en véritables sanglots.
« Bientôt le bruit de sa mort se répandit dans toute la ville et partout ce fut un concert d’éloges et de regrets ; les visites de condoléance affluèrent. Le sous-préfet vint dans la matinée et voulut considérer la dépouille mortelle de notre cher confrère. Il fit alors quelques réflexions bien justes. Puissent-elles être sincères et produire dans sa pauvre âme un germe de salut ! « Vous autres, chrétiens, me dit-il, vous ne craignez pas la mort, car elle est pour vous « le commencement d’un bonheur céleste et éternel, mais nous.......» Et il sembla méditer pendant quelques instants.
« Le préfet vint aussi. Quand on m’apporta sa carte de visite, j’étais moi-même sur mon lit, cloué par la fièvre. Je ne pouvais donc pas le recevoir et le priai de m’excuser. Mais lui, sans s’offenser de mon refus dont il comprenait, du reste, parfaitement les raisons, força la consigne et, malgré ses habits et son train de cérémonie, vint tout simplement me voir dans ma chambre de malade : ce qui pour un grand mandarin chinois et païen est une chose bien extraordinaire. Nous causâmes assez longuement, puis il voulut, lui aussi, voir une dernière fois le visage de son ami. Il se rendit donc à la chapelle où tous nos, chrétiens de la ville et des villages, à dix ou quinze lieues à la ronde, chantaient l’office des morts.
« A son entrée, les chants cessèrent. Il se recueillit un instant devant le cadavre, puis s’adressant aux chrétiens : « Votre Père est monté au ciel jouir de l’éternelle félicité. Vous « venez prier auprès de lui, c’est bien ! Mais vous avez un grand devoir à remplir, c’est celui « de la reconnaissance. Le Père a travaillé, il a vécu, il a souffert, il est mort pour vous, pour « vous enseigner la vertu et vous exhorter à la pratiquer. Il faut donc être reconnaissants. « Votre reconnaissance, vous la prouverez par votre fidélité à mettre en pratique les « enseignements qu’il vous a donnés, par votre ponctualité à observer tous les préceptes de « votre précieuse religion. Rappelez-vous donc tout ce qu’il vous a prêché. Il vous reste « encore un Père, il faut lui obéir, écouter ses conseils et en faire la ligne de votre conduite, « etc.,etc....... »
« Ces paroles sont sorties de la bouche d’un grand mandarin païen, dans un oratoire chrétien et devant le cercueil d’un missionnaire. Cela se voit-il bien souvent en Chine ? Sans doute, le bon Dieu nous a singulièrement favorisés à Tong-tchouan en nous envoyant de semblables mandarins. Mais seraient-ils aussi aimables si le missionnaire n’avait su habilement seconder d’aussi bonnes dispositions ?
« Le P. Pourias avait cette précieuse qualité. Une parfaite connaissance des mœurs du Céleste-Empire et une aptitude spéciale pour traiter avec les mandarins, lui avaient acquis partout où il est passé, non seulement l’admiration, mais l’estime universelle de ces derniers. Et cependant, devant eux, jamais il n’a oublié son caractère de prêtre, ni sa vocation de missionnaire. Il savait glisser dans la conversation quelques mots de doctrine, destinés à produire dans la suite des germes de salut.
« Je devrais parler maintenant de la carrière apostolique de M. Pourias. Vous me permettrez d’être bref sur ce point. Vous avez lu le récit plein d’intérêt qu’il a fait lui-même de ses huit premières années d’apostolat, et que les Missions Catholiques ont publié sous le titre de : « Mon district et huit ans de séjour au Yun-nan. » Il a raconté ses travaux et ses souffrances, ses succès comme ses épreuves. Ce récit est l’histoire de l’Église de Ku-tsin-fou, dont le doyen, le cher Père Birbes, est venu me consoler il y a peu de temps.
« Après huit années passées à Ku-tsin, M. Pourias se rendit à Péking et de là à Hong-Kong. A son retour au Yun-nan en 1876, il bâtit la résidence épiscopale de Yun-nan-sen. A peine ce travail état-il achevé que le cher Père était obligé d’aller de nouveau chercher la santé à Hong-Kong. A son retour en 1881, il fut placé à Tong-tchouan.
« Ce district fondé par Mgr Fenouil ne comptait alors qu’une soixantaine de néophytes ; de plus, cette chrétienté toute jeune encore était éprouvée par la persécution. Les francs-maçons chinois l’avaient complètement ruinée, et dans la ville et les environs le nom chrétien était en horreur. En moins de trois ans, comme les choses ont changé d’aspect ! A peine le P. Pourias était-il installé ici que les néophytes prirent courage : le Père sut se faire aimer de tous et, à l’heure qu’il est, nous comptons plus de quatre cents chrétiens baptisés, sans parler de plus de deux mille catéchumènes. Dans un rayon de dix à quinze lieues autour de la ville, dix nouvelles stations se sont ouvertes : quelques-unes comptent plus de cent néophytes. Quand la mort a surpris le P. Pourias, il était en train de bâtir deux nouvelles églises, l’une à trois lieues de la ville, l’autre à une douzaine de lieues.
« Ces chiffres disent assez éloquemment quels furent le zèle et l’habileté de notre regretté confrère. La mission a donc perdu un de ses meilleurs ouvriers, mais sans doute, elle compte au ciel un protecteur de plus. J’espère qu’il nous aidera du haut du paradis, et que ses prières nous obtiendront pour notre ministère d’abondantes bénédictions. »
M. Émile-René Pourias était né à Saint-Martin du Bois (diocèse d’Angers), le 16 septembre 1843. Il entra au séminaire des Missions le 13 septembre 1865, y fut ordonné prêtre le 6 juin 1868, et partit pour le Yun-nan le 16 août de la même année.
References
[0994]POURIAS René (1843-1884)
Bibliographie. - La Chine. Huit ans au Yun-nan, récit d'un missionnaire. - Société de Saint-Augustin, Desclée, de Brouwer et Cie, imprimeurs des Facultés catholiques de Lille, Lille, 1888, in-8, pp. viii-188.
Comp.-rend. : M. C., xx, 1888, p. 252.
Notes bio-bibliographiques. - C.-R., 1877, p. 17 ; 1881, pp. 41, 44 ; 1882, p. 39 ; 1883, p. 42 ; 1886, p. 178. - A. P. F., liv, 1882, La station de Tong-tchouan, p. 347. - M. C., xiii, 1881, Mon district et huit ans de séjour au Yun-nan, pp. 365, 377, 390, 404, 416, 427, 436, 452, 463, 472, 486, 501, 512, 521, 534, 546, 571, 585, 593, 610, 617 ; xiv, 1882, Mon district (suite), pp. 17, 29, 44, 58, 66, 82, 92 ; xv, 1883, p. 121.
Œuv. Prop. Foi, Angers, comp.-rend., 1877, p. 33 ; 1878-80, p. 10.
Notice nécrologique. - C.-R., 1884, p. 197.